Oui, et alors ? - Mot-clé - ArcepEn vrac, tout ce qui me passe par la tête. J'essaye de ranger, mais pas toujours.2024-03-28T23:54:25+01:00urn:md5:f11ddf38415bb1585210f5b4b16563d5DotclearLa vie des grands fauves, tome 5urn:md5:06e907deda4f172a537fd5e0b85f0fb42006-07-26T17:30:00+02:002015-11-26T20:32:30+01:00Benjamin BayartTélécomsArcep<p>L'<a href="http://www.arcep.fr/">ARCEP</a> (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et Postales, ex-ART) se propose de lever le contrôle imposé à FT (France Télécom) sur le marché de gros de la vente de collecte nationale.</p><p>Ce contrôle, qui avait été allégé il y a un peu moins d'un an était lié à une étude du marché de gros de la collecte nationale en ADSL. Avant l'allégement, FT présentait son offre de référence à l'ARCEP qui décidait de la valider ou pas. Après l'allègement, FT mettait en place son offre, et l'ARCEP pouvait postérieurement la retoquer si une distorsion de concurrence se faisait jour. L'ARCEP propose aujourd'hui de lever complètement ce contrôle, considérant que le marché évolue spontanément vers la concurrence.</p> <h3>Distorsion de concurrence</h3><p>Il faut bien comprendre que l'ARCEP ne fonctionne pas avec le « bon sens » commun, outil trop dangereux par nature, mais avec des outils économiques nettement plus compliqués à comprendre et plus abstraits. Je vais essayer d'expliquer avec mes mots les deux éléments clefs.</p><p>Le premier élément est le ciseau tarifaire. C'est un élément qui est intéressant sitôt qu'une entreprise réalise une concentration verticale, sitôt qu'elle fait à la fois de la vente en gros et de la vente au détail. Si une entreprise vend au détail au prix <i>z</i>, et qu'en même temps elle vend le même produit en gros au prix de <i>x</i>, et que les pratiques usuelles du marché font que pour transformer le produit de gros en produit de détail ça coûte <i>y</i>, le prix de vente minimum d'un détaillant qui s'approvisionne chez cette entreprise est <i>x+y</i>. Mécaniquement.</p><p>Les deux prix, <i>z</i> pour le prix de détail et <i>x</i> pour le prix de gros sont faciles à comprendre. C'est le prix <i>y</i> qui est plus compliqué à comprendre. C'est par exemple, pour un marchand de fruits et légumes le prix de son magasin, le salaire de la vendeuse, l'entretien de la caisse enregistreuse, etc. Pour un fournisseur d'accès ADSL, c'est par exemple les frais de facturation (édition et envoi de factures, le système informatique qui traite tout ça, etc), le service client (le service administratif qui traite les abonnements, la hotline, etc).</p><p>Si le prix de détail est de 10, si le prix de vente en gros est de 8, et si le prix de transformation du gros en détail est de 3, alors on a un ciseau tarifaire. Quelqu'un qui voudrait monter une offre concurente serait contraint de vendre plus cher que le prix de détail partiqué par son fournisseur. On peut alors ergoter, si le détaillant était mieux organisé, payais moins cher ses esclaves, heu ses salariés, trouvait un système informatique plus efficace, peut-être qu'au lieu de 3 la transformation pourrait lui coûter seulement 0,8. Auquel cas le ciseau tarifaire disparaît.</p><p>Il y a un cas cependant où le ciseau tarifaire est absolument évident, c'est quand le prix de gros est plus élevé que le prix de détail. Par exemple quand (on ne dira pas son nom) vend en gros à une association 15,15 € ce qu'il propose à 14,90 € au prix de détail.</p><p>Si ça se produit dans le monde des télécoms, et si c'est le fait d'un opérateur puissant (c'est à dire d'un opérateur à même de modifier le marché de son seul fait), alors l'ARCEP peut intervenir et faire changer le prix de gros et/ou le prix de détail. C'est par exemple ce qui est en train de se passer sur le prix de gros des SMS, l'ARCEP commence à intervenir. Le seul opérateur puissant dans le marché de l'ADSL est FT. Une pratique anti-concurentielle d'un autre acteur ne pourra donc être sanctionnée que par la DGCCRF, pas par l'ARCEP.</p><p>Une autre façon de voir le ciseau tarifaire est de considérer que la vente au détail de la grande entreprise est basée sur son offre en tant que grossiste. Par exemple en isolant dans une filiale la vente au détail. En toute logique, cette filiale fera de la vente à perte, compensée globalement par les bénéfices de la filiale grossiste.</p><p>L'autre élément est le tarif d'éviction. C'est plus facile à comprendre. C'est simplement, pour une entreprise ayant une position dominante de vendre tellement peu cher qu'aucun concurent ne pourra s'installer. Ainsi, si c'est le prix de vente en gros qui est trop élevé, on parle de ciseau tarifaire. Et si c'est le prix de vente au détail qui est trop bas, on parle de tarif d'éviction.</p><h3>Transposons dans les télécoms</h3><p>Voyons ce que ça donne dans le marché de la vente en gros de collecte ADSL nationale. Si FT fait cette vente à un tarif prohibitif, personne ne peut utiliser son offre de vente en gros. Et si FT fait cette vente en cassant les prix, aucun opérateur ne pourra se baser sur son réseau de dégroupage (collecte régionale) pour faire une offre de collecte nationale qui ne serait pas rentable face à l'offre nationale.</p><p>Quand un marché doit être régulé, l'ARCEP se base (entre autres) sur ces deux élements pour savoir si une offre est valable ou pas.</p><h3>Marché pertinent</h3><p>Pour qu'un marché précis du monde des télécoms soit « pertinent », c'est-à-dire soit succeptible d'être régulé par l'ARCEP, en se basant sur les textes européens qui régissent la libéralisation des télécoms, il faut qu'il remplisse 3 critères:</p><ul><li class="item">l'existence de barrières élevées et non provisoires à l'entrée, qu'elles soient de nature structurelle, légale ou réglementaire (par exemple s'il faut avoir déjà dégroupé 500 centraux téléphoniques pour avoir le droit d'en dégrouper, ça interdit d'entrer sur le marché);</li><li class="item">les marchés dont la structure ne présage par d'évolution vers une situation de concurrence effective (par exemple, si une entreprise en position dominante pratique des tarifs d'éviction, le marché seul ne permettra pas aux concurrents d'émerger);</li><li class="item">l'incapacité du droit de la concurrence à remédier à lui seul à la ou aux défaillances concernées du marché (moins clair, ça doit pouvoir s'interpréter par exemple si c'est un marché en évolution très rapide alors que les procès pour entrave à la concurrence durent des années, ou si l'entrave à la concurrence n'est pas suffisante pour que l'action de la justice puisse suffir à rétablir la situation).</li></ul><p>Le principe est donc simple: si ces trois critères ne sont pas réunis, il n'y a pas lieu de réguler le marché.</p><p>Il est intéressant de constater que ces critères sont à appliquer entre les acteurs du marché en question, entre eux. Pas vis-à-vis de leurs clients. Ainsi, si c'est un marché de gros, et s'il interdit l'apparition de détaillants, ce n'est pas pris en compte, du moment que les grossistes sont effectivement en concurence.</p><h3>L'analyse de l'ARCEP</h3><p>Sur le marché de gros des offres de collecte ADSL nationales, il n'y a en ce moment que deux acteurs, France Télécom et NeufCegetel. Un troisième va bientôt se lancer dans la course : Completel, dont un des détaillants est par exemple Darty.</p><p>L'offre de référence de FT ne représente plus que 40% du marché. Combiné avec l'entrée imminente d'un nouvel acteur sur le marché, ça fait dire à l'ARCEP que le marché va évoluer spontanément vers une concurrence effective. C'est-à-dire que les 3 grossites seront bien effectivement en concurrence pour le bénéfice de leurs détaillants.</p><p>En ce sens, l'analyse de l'ARCEP est valable.</p><p>Par contre, le fait qu'il n'émerge pas (ou peu) de détaillants ne préoccupe pas l'ARCEP. Le fait que le marché de gros empêche l'entrée de nouveaux venus sur le marché de détail ne préoccupe pas l'ARCEP. Et l'ARCEP a raison. L'ARCEP applique les textes qui ont été votés par les politiques, au niveau européen et au niveau national. Et les textes indiquent clairement, par les trois conditions qu'on a vu, que le but n'est pas d'introduire la libre concurence sur le marché de détail, mais simplement de permettre aux gros opérateurs d'un pays de pouvoir s'installer dans un autre.</p><p>La présence d'Orange (FT) dans de nombreux pays européens sur plusieurs marchés (téléphonie mobile, accès à Internet, etc), et la présence de plusieurs opérateurs historiques étrangers en France (Deutshe Telekom, alias Club-Internet; Telecom Italia, alias Alice), indiquent clairement que les politiques européens, principalement la Commission, sont des gens doués et efficaces. Leurs textes ont eu précisément l'effet escompté.</p><h3>Conclusion</h3><p>De tout cela, il ressort qu'effectivement, au sens des textes européens, il n'y a plus lieu de réguler le marché, puisqu'il existe une concurrence entre grossistes. Mais il ressort aussi que les pratiques anti-concurentielles empêchant, ou freinant, l'entrée de nouveaux acteurs sur le marché de détails sont légion.</p><p>Pour arriver à cette conclusion, il ne suffit pas d'analyser le marché de gros, ou le marché de détail, indépendament. Il faut analyser les deux marchés ensemble, et se demander pourquoi il y a tellement peu de détaillants, alors que la demande est si forte.</p><p>Le grand public est demandeur d'offres « Leader Price » en matière d'accès à Internet, d'offres pas cher, avec un service à peu près nul. Mais il y a aussi, c'est incontestable, une demande pour un service moins bas de gamme, avec un vraie assistance (par exemple une assistance à domicile). Le public est aussi demandeur d'une relation privilégiée avec un « artisan informatique » de quartier, comme on en a une avec son boucher par exemple. C'est donc bien surprenant que cette offre n'apparaise pas, alors qu'il y a une demande. La raison en est simple, les textes ne sont pas fait pour ça. Et, là encore, c'est bien de choix politiques qu'il est question.</p>https://edgard.fdn.fr/blog/index.php?post/2006/07/26/La-vie-des-grands-fauves%2C-tome-5#comment-formhttps://edgard.fdn.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/9La vie des grands fauves, tome 4urn:md5:8d3027d0009bebac984c0b3c5118e7602006-06-16T17:28:00+02:002015-11-26T20:15:46+01:00Benjamin BayartTélécomsArcep<p>On est quelques-uns, en France, à réfléchir autour des structures pour créer une dynamique réseau, autour du FTTH, autour des opérateurs locaux, des opérateurs alternatifs, etc.</p><p>Un point revient régulièrement dans nos réflexions : si on veut éviter la concentration d'Internet aux mains de quelques multinationales incontrolables, il faut en passer par des opérateurs neutres. Il faut éviter les concentrations verticales. J'en parle d'ailleurs dans le <a class="ref-post" href="https://edgard.fdn.fr/blog/index.php?post/2006/03/25/La-vie-des-grands-fauves%2C-tome-1">tome 1</a> de cette série sur la vie des grands fauves.</p> <p>En effet, le modèle serait celui-là: le réseau physique appartient aux pouvoirs publics (région, État, etc). Par un moyen quelconque (service public, délégation de service public, autre) ce réseau est mis à disposition de tous les opérateurs, aussi bien les grands opérateurs nationaux que les micro-opérateurs locaux. Et bien entendu, dans des conditions équitables et qui permettent à chacun de s'y retrouver. Par exemple, en évitent les frais fixes au début du contrat : s'il faut payer 20.000 € avant de commencer à travailler, les PME ne pourront pas se créer autour.</p><p>En gros, jusqu'à présent, sur ce sujet là, j'avais croisé deux opinions classiques. D'un côté, les gens qui veulent éviter le monopole et qui veulent une concurence très ouverte, où les opérateurs locaux peuvent cohabiter à côté des opérateurs nationaux ou internationaux. De l'autre côté, les gens qui trouvent que l'ADSL se développe très bien, qu'il suffit de laisser France Télécom investir en paix et bien tout monopoliser, et que quand le gâteau sera gros les lions (Free, NeufCegetel, etc) se débrouilleront bien pour en récupérer un bout.</p><p>Ça peut sembler curieux, mais, en gros, l'idée d'une concurrence très ouverte, mettant les opérateurs tous au même niveau, est plus classiquement attachée aux gens de gauche. La libre concurrence, officiellement, c'est pas de gauche. Par contre, l'idée d'un tissus de petites entreprises assurant un développement en région, à l'opposé du monstrueux développement des très grand groupes mondialisés, elle vient de l'alter-mondialisme, et c'est plutôt classé à gauche. Tout aussi curieusement, l'idée de favoriser l'ancien monopole d'État, on la trouve plus souvent chez les gens de droite. Pourtant, France Télécom, qu'est-ce qu'ils ont pu dire comme mal dessus, tant que l'État était majoritaire. Mais voilà, la libre concurrence où le très gros écrase le gros, et où le gros écrase le moyen, c'est un truc qui vient de l'ultra-libéralisme type Madelin. Donc ça vient plutôt de droite.</p><p>Dans le cadre de mes activités associative (<a href="http://www.fdn.fr">FDN</a>) je m'intéresse beaucoup aux réseaux neutres qui sont en train de se créer, pour que FDN puisse aller y fournir de l'accès. Pas forcément rentable, mais pour amorcer quelque chose. Pour aider à faire fleurir sur la région concernée un FAI associatif du même type.</p><p>Le dernier que j'ai trouvé, c'est Net27, le réseau en délégation de service public du département de l'Eure. Donc je suis allé lire les quelques maigres informations disponibles sur leur site Web. Ça commence gentiment, techno ADSL et wiMAX, délégation de service public, bref, ça ressemble bien à ce qui intéresse FDN en ce moment.</p><p>Et puis je suis tombé sur quelques phrases qui m'on fait peur. J'ai l'impression qu'ils on fait un réseau nu. Sans les routeurs. Chacun vient poser ses routeurs partout. Et visiblement, on est présent soit sur tout le réseau du département, soit nulle part. Du coup, pour commencer à discuter, il faut acheter un plein camion de routeurs.</p><p>Un peu plus loin, je lis « La DSP vend en gros aux FAI et chaque FAI vend au détail. Chaque FAI établira librement son prix selon son offre. ». Le mot qui me choque, en plein milieu, c'est le mot « gros ».</p><p><em>Je tiens bien à le préciser : je ne suis pas encore rentré en contact avec les gens de Net27. Jusque-là, j'étais factuel, indiquant ce que j'avais lu et ce que j'en avais compris. Là, je vais me lancer dans ce que j'en déduis, entre autre politiquement. Tant que je n'aurai pas eu quelqu'un de Net27 au téléphone pour me confirmer les conditions financières du machin, l'analyse est à prendre au conditionnel.</em></p><p>On a donc affaire à un nouveau modèle. Le réseau dont les investissements sont faits par les pouvoirs publics, et qui ne sert qu'à rentabiliser les grandes entreprises privées. C'est un concept. Les esprits vifs me diront que c'est forcément un raisonnement de droite. En effet, puisque la zone n'est pas rentable à couvrir pour les opérateurs, si on veut qu'ils viennent, il faut financer pour qu'ils ne perdent pas d'argent. Raisonnement classique de la droite qui veut que quand une entreprise va mal, on la renfloue, et que quand elle va bien, elle paye des dividendes à ses actionnaires.</p><p>Là où ça devient commique, c'est que j'ai découvert ce réseau sur un SPAM du Parti Socialiste. Ils sont très fier, dans leur bla-bla d'auto-promotion de dire que le département de l'Eure, moderne, bla-bla, fibre optique, bla-bla, ADSL, etc. Et que le président du conseil général c'est un gars de chez eux. Contents et fiers ils sont.</p><p>Ils annoncent qu'ils préfèrent favoriser les grandes entreprises plutôt que les associations et petites entreprises. Ils préfèrent pousser NeufCegetel, Alice et Deutshe Telekom plutôt que <a href="http://www.fdn.fr">FDN</a> ou <a href="http://www.neuronnexion.fr">Neuronnexion</a>. Et, eux, c'est le PS. Les champions de la gauche. Ceux qui nous expliquent à longueur de discours politiques qu'on ne peut pas laisser faire ces cochons de capitalistes-financiers.</p><p>S'il vous vient un doute : je ne pense pas que ce brave élu PS ait choisi délibérément une solution comme ça. Je pense simplement qu'il n'y a pas réfléchi. Il n'y a pas pensé. Ça lui paraît tellement évident qu'un FAI, c'est forcément un <em>gros</em> FAI, que tous les FAIs sont, forcément, par loi de la nature, des grandes entreprises. Il n'envisage pas qu'un FAI puisse être une association, ou une PME de quartier, ou une coopérative. Qu'un FAI puisse vivre sans payer des Tunisiens à faire sa hotline, et sans avoir des abonnés mécontents par millions.</p><p>Si le PS était un peu à l'écoute de ce qui existe et de ce qui bouge dans le monde associatif, il aurait peut-être évité cette bourde.</p><p><em>Il ne me reste donc plus qu'à trouver l'adresse mail, s'il en a une, du président de conseil général en question. Une fois que j'aurais vérifié, et si ce que je crains est vrai, je pense que je vais lui demander des explications.</em></p>https://edgard.fdn.fr/blog/index.php?post/2006/06/16/La-vie-des-grands-fauves%2C-tome-4#comment-formhttps://edgard.fdn.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/8La vie des grands fauves, tome 3urn:md5:168b7b39e36ac5be2fdee886f52e3d792006-03-30T17:21:00+02:002015-11-26T20:09:05+01:00Benjamin BayartTélécomsArcep<p>Pour ceux qui n'ont pas suivi l'actualité, hier après-midi, les actionnaires majoritaires de Numéricable (réunion de NC-Numéricable, France Télécom Cable, SEM-Cable et quelques autres bas morceaux) ont annoncé leur intention de racheter, avec l'accord du propriétaire, UPC-France (réunions d'UPC, de Chello, de Noos, et là encore probablement aussi quelques petits bouts).</p><p>Ce n'est pas un rachat hostile, comme on a connu quelques uns ces derniers mois dans différents secteurs. C'est plus une vente de gré à gré, rien de bien violent là-dedans. Bien entendu, on retrouvera là les risques habituels de tous les gros rapprochements d'entreprise (c'est rarement pour salarier plus de personnel qu'ils se rapprochent, mais plus souvent pour dégager les doublons). Mais ce n'est pas mon propos.</p><p>Mon propos, comme c'est devenu l'usage dans cette série de billets, c'est d'essayer de comprendre un peu (et de décrypter pour les gens qui n'ont pas que ça à faire de tout analyser eux-mêmes) ce qui se passe dans le monde merveilleux et, la déesse Europe soit louée, ouvert à la concurrence des opérateurs de télécom.</p> <p>Donc, pour faire simple; l'infrastructure du câble en France, toutes villes confondues, est (sauf erreur ou omission) entre les mains d'une seule et unique entreprise.</p><p>Pour le moment, l'ARCEP semble dormir paisiblement sur ses deux oreilles. C'est pas comme si une infrastructure physique nationale unique (en câble coaxial plutôt qu'en paire de cuivre torsadée téléphonique, mais c'est un détail technique accessoire, finalement) se retrouvait être la possession d'un unique actionnariat privé. Certains facétieux pourraient qualifier ça de situation monopolistique. Si c'était un monopole dans les télécommunications, l'ARCEP s'en serait mêlé. Si l'ARCEP dort, c'est simplement qu'il n'y a pas là matière à ce qu'elle s'inquiète.</p><p>Un peu comme la télédiffusion. On a vu dans ce secteur également se rapprocher le numéro 1 et le numéro 2 français (Canal Sat et TPS, dans cet ordre là). Comme il n'y a pas vraiment de numéro 3 (AB Sat, ça existe encore?), ici aussi, des fâcheux pourraient croire qu'il y a un monopole de fait. Mais pas du tout. Les monopoles, c'est contrôlé par la DGCCRF pour le marché national, et par la Commission Européenne pour les marchés un peu plus grands.</p><p>Concurrence libre et non-faussée qu'ils disent...</p><p>Oui, on a bien vu. Non seulement la concurrence n'est pas une fin en soi, mais à l'extrême rigueur un moyen d'obtenir un effet escompté, mais en plus dans la pratique elle est assez illusoire.</p><p>En l'état actuel, rien ne laisse présager un futur « dégroupage du câble », sauf une éventuelle initiative du seul acteur du marché. Et visiblement nos régulateurs n'ont pas envie de s'en mêler. Qui a dit qu'ils ne servaient à rien, les régulateurs ?</p>https://edgard.fdn.fr/blog/index.php?post/2006/03/30/La-vie-des-grands-fauves%2C-tome-3#comment-formhttps://edgard.fdn.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/7La vie des grands fauves, tome 2urn:md5:aadd0a9b5740ea74fe83a15a56684bda2006-03-25T16:25:00+01:002015-11-26T12:00:07+01:00Benjamin BayartTélécomsArcep<p>Dans les petits plaisir de la vie de tous les jours, quand on essaye d'être un opérateur associatif, il y a les relations avec les différents incontournables. Aujourd'hui, la déclaration auprès de l'ARCEP en tant qu'opérateur de réseau et/ou de services de télécommunications.</p><p><em>Ce billet est destiné à évoluer régulièrement, au fur et à mesure des déboires rencontrés dans la déclaration de FDN auprès de l'ARCEP. Il fera l'objet de tomes suivants, ou de modifications, selon le cas.</em></p> <p>Premier ecceuil, l'ARCEP, organisme public d'état, propose les formulaires à remplir sur Internet, ce qui semble de bon goût pour un organisme qui est sensé réguler le monde des communications électroniques (et postales). Le formulaire de déclaration d'un opérateur est un fichier Word. Il n'est pas proposé d'autre solution : on ne peut pas demander à recevoir le formulaire en papier, il n'est pas disponible en PDF, il n'est pas disponible en OpenDoc. L'ARCEP suppose donc que pour pouvoir être un opérateur de télécommunication, il faut disposer impérativement et évidemment de MSWindows et de MSWord. Le document passe relativement mal sur OpenOffice. Tellement mal qu'il a fallu 3 ou 4 plantages d'OpenOffice pour réussir à remplir le formulaire en s'y prenant en plusieurs fois.</p><p>Ça montre, s'il en était besoin, que l'ARCEP, autorité nationale de régulation d'un service essentiel qui n'est soumis à la concurence qu'à la force du poignet, méconnait les principes que l'État essaye, avec difficulté et sans conviction, de faire avancer : l'indépendance sur le plan informatique. En effet, bon nombre d'administrations, y compris les assedic et un grand nombre de mairies, fournissent de plus en plus leurs documents dans des formats ouverts. Il semble que ce genre de pratique devrait être une base pour un régulateur. Par définition, un régulateur devrait être neutre. Il ne doit pas supposer que les gens utilisent une technologie plutôt qu'une autre, tant que ça n'entre pas en conflit avec la régulation qu'il assume.</p><p>Comme ce qu'il régule, ce ne sont pas les logiciels de bureautique, et comme il n'a pas pour mission de permettre à Microsoft de ne pas souffrir d'un concurrence déloyale, on comprend mal pourquoi les formulaires sont mis à disposition dans un format propriétaire (probablement breveté dans les endroits du monde où c'est autorisé). Bref, on pourrait croire que ça dénote un certain manque d'éthique, alors que ça dénote uniquement un manque de compétences techniques : il y a fort à parier que le responsable qui a décidé de la mise en ligne du document est convaincu que du mail ça se lit forcément avec Outlook, et qu'un texte ça s'écrit forcément avec MSWord. Ça donne une bonne idée de la vision que cette personne là (sans préjuge de l'organisme lui-même) à de la libre concurrence, en matière de logiciels pour cet exemple-là.</p><p>Un détail amusant : quand on lit le long document qui explique, dans un jargon juridique peu clair pour un néophyte, quel type d'opérateur doit déclarer quoi, on peut être agréablement surpris de trouver un lien vers un document en PDF. Mais la surprise est de courte durée : ce formulaire n'est <em>plus</em> valable, il est plus ancien que celui, en format MSWord, qui est en annexe à la fin du même texte.</p><p>Il faut tout de même noter que la majorité des documents présentés sur le site de l'ARCEP sont dans des formats moins hostiles, essentiellement du PDF et du HTML.</p>https://edgard.fdn.fr/blog/index.php?post/2006/03/25/La-vie-des-grands-fauves%2C-tome-2#comment-formhttps://edgard.fdn.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/6La vie des grands fauves, tome 1urn:md5:97b56d117852d5bbf2b7ae5f6e0a592e2006-03-25T16:21:00+01:002015-11-26T11:54:36+01:00Benjamin BayartTélécomsArcep<p>Comme je m'ennuyais un peu ce matin, je suis allé lire (enfin, survoler) les offres de référence de France Télécom en matière de dégroupage ADSL. Ce sont ces offres qui définissent le fonctionnement, et la tarification, du dégroupage entre FT et un opérateur. Ces offres sont présentées par France Télécom à l'ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et Postales) qui les valide. Normalement, l'ARCEP veille à ce qu'il n'y ait pas de distorsion de concurrence. L'institution d'une telle autorité est prévue par les textes européens, pour vérifier que la libre concurrence est effective dans les États Membres de l'Union.</p><p>À la lecture de ces offres de référence, on constate en effet qu'il n'y a pas de distorsion de la concurrence. Les multi-nationales sont a égalité entre elles, et les autres sont hors course. Les textes européens précisent qu'il doit y avoir égalité indépendament de la taille des opérateurs, visiblement l'ARCEP en a fait une lecture pour le moins partielle (voire partiale).</p> <p>Quelques exemples chiffrés, pour se faire une idée. On appliquera ces chiffres à 3 tailles d'opérateurs : 10 lignes (type FDN), 1000 lignes (type Nerim ou NetPratique), 100.000 lignes (type NeufCegetel ou Télé2).</p><p>Si on s'intéresse au contrat de collecte ADSL en IP, qui est le contrat typique pour établir de la collecte nationale, les coûts sont répartis en gros en deux catégories. La première partie est un coût par accès, correspondant soit à la construction d'une ligne ADSL, soit à la location de cette ligne tous les mois. Pour cette première partie. le prix est bien par ligne, qu'on en prenne 10 ou 100.000 ne change rien. La deuxième partie est le prix de la bande passante. Là encore, ça se décompose en deux. D'abord le tuyau qui raccorde l'opérateur à France Télécom, puis la bande passante consommée sur ce tuyau.</p><p>Attention, je n'étudie ici qu'une partie de la structure tarifaire de l'offre. L'offre est assez complexe, et elle impose des coûts à pas mal d'endroits différents, de telle sorte qu'il est très difficile de synthétiser le tout. Les autres postes de coûts sont souvent répartis d'une manière très similaire, avec le même type de disparité : des frais fixes hallucinants qui empêchent les petits de s'établir.</p><p>Le tuyau coûte à l'installation, puis tous les mois, en fonction du débit maximal qu'il peut supporter. La bande passante consommée, elle, coûte en fonction du nombre de Mb/s consommés, le tarif étant dégressif avec le volume (il part de 313 €HT et descend jusqu'à 247 €HT pour les très gros volumes). Les statistiques indiquent que, en moyenne, un abonné ADSL consomme à peu près 30 kb/s, cette moyenne étant vraie pour les gros volumes. Pour les petits volumes, on constate souvent des moyennes plus variables, et souvent plus hautes.</p><p>Notre opérateur à 10 lignes va donc prendre le tuyau le plus petit possible, celui qui ne peut pas supporter plus de 10 Mb/s. En effet, 10 lignes, ça fait 300 kb/s, mettons 500 en comptant large, soit 0,5 Mb/s. Il lui en coûtera 4000 €HT pour faire construire le tuyau, et 1000 €HT par mois pour le faire entretenir. Là dessus, il paiera sa bande passante consommée 313 €HT, puisqu'il ne dépassera probablement pas le premier Mb/s. Il lui en coûte donc, par ligne, 400 €HT d'investissement, et 131,3 €HT de rente mensuelle pour la ligne. À noter que si cet opérateur veut vendre un accès ADSL 2+, disons du 18 Mb/s, jamais, à aucun moment, son client ne pourra atteindre ce débit : le tuyau de collecte global est limité à 10. Passons sur ce détail.</p><p>À retenir : 10 lignes, 400 et 131,3.</p><p>Notre opérateur à 1.000 lignes devrait avoir besoin de 30 Mb/s. Les tailles de tuyaux possibles sont de 10, 30, 60, etc. Il serait fou de prendre 30 (il serait saturé), il prendra donc un tuyau à 60 Mb/s. Il lui en coûtera 5000 €HT de faire construire le tuyau, puis 3500 €HT par mois de le faire entretenir. Il paiera sa bande passante 313 €HT pour les 10 premiers Mb/s, puis 295 pour les 20 suivants (puis 281 au-delà, mais il s'arrête à 30). Pour les 30 Mb/s qu'il va consommer, il paiera donc 313×10+295×20, soit 9030 €HT par mois. L'ensemble de son tuyau lui coûte donc 9030+3500, soit 12.530 € par mois. Il lui en coûte donc, par ligne, 5 €HT d'investissement, et 12,53 €HT de rente mensuelle.</p><p>À retenir : 1.000 lignes, 5 et 12,53.</p><p>Notre opérateur à 100.000 lignes, lui, devrait avoir besoin de 3 Gb/s (soit 3.000 Mb/s). Dans les tailles de tuyau possible, il a le choix entre 2, 3 et 4 Gb/s. Il prendra certainement 4. Il lui en coûtera 25.000 €HT de faire construire le tuyau, puis 36.000 €HT par mois de le faire entretenir. Pour la bande passante, ça donne ça : 313×10 + 295×20 + 281×50 + 267×70 + 257×150 + 247×2700. Soit un total de 3130 + 7900 + 14.050 + 18.690 + 38.550 + 666.900, soit 749.200 €HT par mois. Soit un coût total mensuel de 785.200 €HT. Ça donne donc, par ligne, 0,25 €HT d'investissement et 7,85 €HT de rente mensuelle.</p><p>À retenir : 100.000 lignes, 0,25 et 7,85.</p><p>Après mûre réflexion, l'ARCEP arrive à la conclusion que la concurrence est libre et non faussée, et que conformément aux textes européens, la taille de l'opérateur n'influe pas sérieusement.</p><p>Étonnant, non?</p>https://edgard.fdn.fr/blog/index.php?post/2006/03/25/La-vie-des-grands-fauves%2C-tome-1#comment-formhttps://edgard.fdn.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/5